Sois sympa, mets toi à sa place, c’est passible de prison, tu te rends compte des risques, y a qu’à, faut qu’on…

On le sait : sans formation sur nos fonctionnements, nos mécanismes de défense, nos besoins, le rôle des émotions,… la prévention par la peur, par l’appel à l’empathie, par la contrainte, par une pédagogie descendante ne fonctionne pas avec nos ados. Pourtant on continue de la proposer. Parfois faute de mieux, parfois par peur de ce qui pourrait sortir de la boîte de Pandore, souvent par manque de connaissance d’outils vraiment efficaces pour dénouer des situations ultra complexes.

Depuis des années, je développe des interventions de sensibilisation et co-développement par le théâtre forum et l’improvisation théâtrale dans le monde scolaire. Nous nous inspirons de la méthode d’Augusto Boal créateur du théâtre forum au Brésil dans les années 1970.

Quand quelque chose fonctionne il est étonnant de ne pas plus l’utiliser… pas besoin d’intelligence artificielle, de procédés complexes, de vidéos coûteuses. Les jeunes ont les réponses et solutions en eux. Il s’agit simplement de savoir les faire émerger et de pouvoir les rassurer et les accompagner dans cette démarche.

Boal était dramaturge, écrivain, théoricien, metteur en scène. Il développe ce qui deviendra bientôt le Théâtre de l’Opprimé. « Le spectateur ne délègue aucun pouvoir pour qu’on agisse ou pense à sa place. Il se libère, agit et pense par lui-même. » Le théâtre devient action, le spectateur devient « spect’acteur ».

Nous avons adapté ce concept de Theâtre Forum pour en proposer des ateliers de co-développement en classe afin de prévenir le harcèlement scolaire au collège. Les jeunes préparent une saynète d’une situation réelle vécue comme difficile. Par le jeu, ces saynètes théâtrales choquantes voire révoltantes nous permettent de mieux saisir les enjeux des situations de harcèlement.

Vivre ces saynètes, jouées par des comédiens professionnels, ou par les jeunes eux-mêmes, permet de prendre du recul, de libérer les émotions, d’aborder les sujets sensibles et de favoriser les échanges.

Définir ensemble ce qu’est le harcèlement et comprendre pourquoi nous luttons contre.

Libérer la parole et les émotions des jeunes et les outiller en réflexes : quelle réaction à avoir, quelles limites à poser, quelles procédures d’alerte utiliser, quelle posture adopter ?

Se mettre dans la peau des différents acteurs revient à pratiquer un entraînement « grandeur nature » : ensemble on prend conscience de ce qui se joue, de l’impact sur chacun et sur les relations interpersonnelles.

Notre démarche de théâtre forum vise à sensibiliser, à prévenir les dérives par la mise en jeu et la prise de conscience des mécanismes du harcèlement en action dans le quotidien des jeunes, et à chercher ensemble comment les dénouer et les contrer. Le but est de comprendre et de débattre ensemble de manière ludique et pourtant sincère.

Par le jeu théâtral, faire émerger la parole et la réflexion, changer de point de vue sans faire de victimisation ni de moralisation et expérimenter ensemble les solutions possibles à des problématiques concrètes pour donner les bons réflexes.

On s’arme avec des outils pratiques utilisables dans la vie quotidienne, permettant aux jeunes de repartir plus optimistes quant à la possibilité de participer au changement des mentalités et des comportements et d’avoir un impact dans le monde.

Le travail sur la responsabilité individuelle et collective est au cœur de notre philosophie d’intervention.

Méthodologie d’intervention

Théâtre : Dans un premier temps, les comédiens (ou les jeunes eux-même) jouent une scène sur des questions de vie quotidienne autour des questions de harcèlement vécue comme difficile, discriminatoire ou insultante.

Forum : Le meneur de jeu fait rejouer la scène et favorise le débat avec le public. Il invite les membres du public à remplacer les comédiens et à expérimenter par le jeu théâtral des solutions possibles. Le spectateur devient « SpectActeur » et construit par le jeu ses réflexes, ses valeurs, ses engagements.

Les questions sont posées, les jeunes parlent de leur réalité, de leurs difficultés à intervenir, de leurs prises de conscience, de leur responsabilité individuelle et collective et trouvent ensemble des pistes concrètes d’action.

Violence , rapport de force, répétitivité, isolement de la victime : quand dépasse-t-on les limites ? A quel moment s’inquiète-t-on ?

Posture, peur, honte : comprendre le mécanisme pour reprendre le pouvoir.

Victime, témoin, harceleur, meneur, suiveur… Ai-je un rôle à jouer ? Poids du groupe, responsabilité individuelle et préoccupation partagée.

Harcèlement 2.0 : Le flot ininterrompu… photos, réseaux, insultes, diffamations et intimidations. Peut-on couper ?

Nos jeunes ont les solutions en eux : écoutons-les.

Il est temps.

Helene Farret Cassegrain
Founder & CEO IMPROACTIF, event & formation